Horizons & Mots

Couchée sur mon matelas, sans draps et sans couvre-lit, sans aucune autre émotion que la dérive qui m'habite, sans aucune autre équivoque ni trace de l'arme que je porte à mes mains, l'arme qui tue tout ce qui n'est tracas, je deviens éphémère quand on porte soin à mon corps qui devient défaut, je suis silence quand on crie à ce que je veux bien être.

Pourtant tout est si beau autour de ceux qui aiment s'aimer, et je suis là comme la larve qui ne comprend rien de tout ça, je veux juste arrêter d'avoir mal, arrêter d'être quelqu'un qui prétend bien vouloir tout faire et toujours bien se porter, toujours sourire la bouche fendue aux oreilles, bien s'asseoir et faire que tout le monde m'aime, tout le temps, n'importe quand, n'importe comment, parce que je dois me faire aimer pour exister, je dois exister aussi autrement qu'à travers les autres si je veux sourire sans toujours devoir fendre ma bouche à l'infini, je ne veux pas être le brouillon pour les textes d'autrui, non je ne veux pas être un vieux papier mâché qu'on regorge de honte en jetant dans une poubelle, je ne veux pas être un cri de terreur qu'on oublie au loin dans une forêt, je veux qu'on m'écoute et qu'on m'accompagne même si j'ai encore peur d'être, je ne veux pas exister seulement pour quiconque, j'aimerais suffire à mon unique présence, suffire à qui je suis, il me semble que c'est pas trop demander, vouloir être juste un minimum heureuse dans l'univers qui nous vole tout ce qu'on veut posséder de bonheur, pis comme si le bonheur était quantifiable et achetable, comme si le bonheur était un portefeuille rempli, pis j'en veux pas de ces joies quantifiables par le cash, quantifiable à la chirurgie de l'heure, quantifiable aux biens matériels, le bonheur moi je le vois comme étant si abstrait, l'abstraction de ce que je veux bien m’enivrer, il me semble que c'est pas trop demander, de juste vouloir être heureuse un minimum, arriver à vivre sans tout détruire.
- Marjolaine Robichaud, 2 Novembre 2017