Salut Marjolaine. Je sais ce que tu ressens. T'inquiètes, parce que tout ira de mieux en mieux. Je sais que tu ne me crois pas, parce qu'en ce moment c'est l'enfer, et c'est pas possible de vivre pour toi-même... Chaque jour est un fardeau, que ce soit à l'école ou ailleurs. Le matin, c'est les vomissements dus au stress, c'est la route vers l'école en secondaire pendant que la fille de la 15e avenue rit de toi comme une débile à cause que tu t'es enfargé il y a un an et qu'elle te ridiculise encore pour ça - et pour ton look de garçon manqué. C'est ton chemin en solitaire et la crainte de ce qui va arriver, encore, chaque matin, le déjeuner prit de travers. Je me rappelle à quel point c'était "tough", les larmes refoulées. Tu t'arranges pour arriver en retard en classe, parce que tu le "sais" que tu vas te faire écœurer. Avoue que c'est dégueulasse ein comme actions, ce qu'ils font? Ils sont lâches, en gang de gars, pis les profs font rien. T'es à la toilette en plein quand le cours vient de commencer, c'est impossible d'entrer tout de suite, il faut que tu te vides le cœur, les intestins et les entrailles. Le dîner, tu viens de le manger aux toilettes. Je te le dis: ça ira mieux. Tu lis sûrement ceci en te disant que c'est de la foutaise, mais on t'aimera pour qui tu es réellement, Marjolaine. Je sais que t'as le cœur fendu en deux, qu'à chaque fois que tu aimais un gars, il te riait en pleine face, que Jean-Christophe t'a ridiculisé dans la cafétéria en face de tout le monde tandis que tu ravalais tes larmes, on te l'a tout le temps dit, que t'es une planche de plywood pas de totons avec la face d'un montre pis que ta coupe champignon, bien que ça te fait pas. Je le sais. Est-ce que tu le sais que plus tard, on te dira sans cesse que tu es belle et que tu auras confiance en toi davantage? Tu t'en rends peut-être pas compte, mais c'est ce qui arrivera. Je te le jure... Crois-moi. Tiens un bon bout... T'as tenté de te suicider plein de fois, et ça n'a pas fonctionné, mais pour les bonnes raisons, parce que dans quinze ans, ou nous sommes au moment présent, tu verras que nous serons heureux. Pas totalement, mais beaucoup plus qu'à ce jour ou tu lis ce message, dans ta chambre minuscule ornée de posters des Backstreet Boys et de jolis garçons. Tu te dis que tu vas être seule toute ta vie, jamais comprise parce que tu es hors de la norme... Je le sais. Tu rêves d'avoir tes propres soirées de poésie, par contre le stress est si grand que tu ne peux même plus te concentrer... Tu n'apprends pas, tes cours ne sont pas en classe mais dans la cafétéria... Parce que la direction en a décidé ainsi; elle a voulu éviter le problème en ne punissant pas ceux qui t'intimident en classe, mais bien toi. Donc tu es mise de côté, toujours sur tes gardes, toujours solitaire. Dans quelques années ma belle, tu seras libre. Pas totalement, tu n'en auras pas l'impression, mais tu seras en bataille quotidienne avec tes démons. Tu es agoraphobe, anxieuse chronique et dépressive... Sache que la lumière, tu la verras. Ça risque d'être très long, une bonne dizaine d'années à parcourir les chemins les plus croches et déments, feras des trucs décadents dont tu regretteras, mais c'est de cette façon mon ange que tu en tireras les meilleures leçons. Tu essaieras la drogue, défieras les lois de la gravité, fera tout pour ne plus te sentir seule, à en harceler les gens autour de toi par carence affective. Et ça passera, parce que tu es forte, tu t'es créé des mécanismes d'autodéfense pour survivre avec tes démons. Et, ce dont j'ai parlé plus haut, les soirées de poésie... Tu l'as, ce rêve d'animer tes soirées plus tard, non? Ça se réalisera. Je ne blague pas, mon ange. Tes peurs seront vaincues, et l'entrée en classe n'est plus dramatique comme ce que tu vis en ce moment. T'es toute seule, tu ne fais pas partie d'aucune "clic", toutes les filles sont plus belles que toi, c'est ce qu'on te dit, te fait sentir, mais aussi ce que tu ressent. Aucun garçon de veut de toi. Mais sache que l'amour, tu le connaîtras, la lumière sera vive, et chaque jour sera de mieux en mieux, petite Marjolaine. J'aimerais ça être près de toi quand tu pleures en solitaire... Je sais ce que tu as vécu, toutes les sortes d'abus, physique ou moral... Et ce poids sera de moins en moins lourd, toute la vie te paraîtra beaucoup plus légère, je te le dis... Ne désespère pas.
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